Nous évoquions dans un précédent article le projet de loi incluant l’interdiction des emballages plastiques dans la restauration collective. Plusieurs amendements publiés fin juin 2018 viennent contester plusieurs articles proposés. Les contenants en plastique seront bien interdits dans la restauration collective, mais les bouteilles d’eau plates restent au cœur du débat.
L’utilisation de bouteilles d’eau plate pour la restauration collective devait être interdite par le projet de loi « Relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire » de 2018. L’impact écologique et la santé publique étaient avancés pour justifier cette décision. Mais le Sénat a publié plusieurs amendements pour contester ce projet, en évoquant trois raisons principales.
Selon le Sénat, « aucune étude réalisée dans notre pays n’a mis en évidence le risque de pollution de l’eau minérale par des perturbateurs endocriniens. […] L’eau minérale naturelle est l’un des produits les plus sûrs de notre alimentation. D’origine souterraine, à l’abri de toute pollution humaine, l’eau minérale ne subit aucun traitement de désinfection. La bouteille est nécessaire pour préserver les qualités intrinsèques de l’eau minérale naturelle, comme la stabilité de sa composition en minéraux et oligo éléments. L’eau minérale naturelle est obligatoirement embouteillée à la source, et fait l’objet d’un suivi extrêmement rigoureux et régulier. »
Au contraire, l’eau du robinet serait plus exposée à des contaminations. Et que faire en cas de pollution dans l’eau du robinet si les bouteilles en plastique sont interdites ? Le Sénat est convaincu qu’il faille laisser chaque territoire prendre ses propres décisions notamment en cas de pollution ponctuelle. Par ailleurs, les publics fragiles (femmes enceintes, bébés, personnes âgées…) ne doivent pas être privés de cette liberté de consommer de l’eau en bouteille.
L’argument écologique est également réfuté car, toujours selon le Sénat, « les bouteilles en PET sont entièrement recyclables et constituent le deuxième emballage le mieux trié après le verre ». En effet, les bouteilles d’eau sont 100% recyclables. Et aujourd’hui, 63% d’entre elles sont recyclées en France. C’est ce taux de collecte qu’il faut aujourd’hui chercher à augmenter, et non pas la suppression des bouteilles plastiques indispensables pour conserver l’eau de source.
Enfin, le Sénat assure que le marché industriel de l’eau en bouteille ne peut pas être supprimé sans mesure économique. Le champ d’application, à savoir la restauration collective, est trop vaste pour appliquer cette mesure sans anticiper les conséquences industrielles, économiques et sociales.
Si ces amendements s’avèrent recevables, le projet de loi « Relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire » contient d’autres dispositions qui posent débat. La commission mixte paritaire qui s’est réunie le 10 juillet n’est pas parvenue à l’élaboration d’un texte commun. « Le rapporteur de l’Assemblée nationale, sous la conduite du président de la commission des affaires économiques de l’Assemblée, a décidé de revenir sur des rédactions votées dans les mêmes termes par les deux assemblées. » Le Sénat déplore ce dysfonctionnement de la navette parlementaire, qui implique un retard dans l’adoption du texte. Le projet de loi dit « EGalim » risque donc encore de faire parler de lui.